Promenade
au vent
Suivi
d'un certain regard, il marche vers une
ville dans laquelle on ne sait comment entrer
- personne n'en sort - mais au-dessus de
laquelle on voit de grands échaffaudages
supportant chacun plusieurs projecteurs
pointés vers le ciel.
Il
marche depuis des mois à la recherche
d'un être semblable à lui-même,
semblable au vent qui pousse le sable pour
ne pas revenir sur ses pas.
Les
traces qu'il laisse sur le sol ne veulent
rien dire: elles n'indiquent ni la présence
ni la volonté ni même l'espoir
d'une conscience; tout au plus signalent-elles
la marche du vent.
Seul,
sur le pont à regarder la nuit s'éloigner,
il perdit, peu à peu, la mémoire
des autres, le souvenir des siens.
Sur
le corps des oiseaux, à peine recroquevillé,
des couleurs somptueusement mortes comme
une peinture inachevée perdue dans
les toiles.
Puis
la chaleur éclata, blanche, sur tous
et tout.
Une
musique hurlante se tenait à chaque
coin de rue.
Le
ciel était barriolé de chemises
et de draps pendus à un réseau
très complexe de cordes à
linge.
Il
marcha lontemps dans la ville, respirant
son air vicié mais, pour lui, exotique.
- Dimitri
MOLIAVKO-VISOTZY (©1984)
- Musicien
et écrivain genevois
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